Bible : La participation comme responsabilité partagée dans l’Evangile de Luc
Publié le 31/01/2019La mission des 72 disciples du Christ (Luc 10,1-20) : Il est probable que le récit de Luc 10,1-20 fasse allusion au récit de Nombres 11. Les chiffres des deux récits concordent : 72 disciples, soit le même nombre que les 70 anciens auxquels s’ajoutent Eldad et Medad. Le lien entre les traditions du Nouveau Testament et les Écritures d’Israël est étroit.
Ce lien manifeste qu’en Jésus-Christ, les attentes et les espérances d’Israël se trouvent réalisées, ou, pour reprendre le vocabulaire du Nouveau Testament, se trouvent « accomplies » : Jésus, par sa mission et par son ministère public, « accomplit » et « achève » l’œuvre de Moïse, c’est-à-dire qu’il conduit le peuple de Dieu dans sa patrie définitive : le Royaume de Dieu.
Les groupe des soixante-douze disciples est plus large que le groupe des douze Apôtres. Ce chiffre symbolique manifeste que nombreux sont ceux qui sont appelés à participer à la mission. De même qu’en Nombres 11, cette participation requiert normalement une institution. Mais le corpus des lettres de Paul, et le second volet de l’œuvre de Luc — les Actes des Apôtres — manifestent que le travail de l’Esprit est plus large que les prévisions ou les organisations humaines. Paul, en effet, ne fait partie ni du groupe des douze Apôtres, ni du groupe des soixante-douze disciples, ni du groupe des sept « ministres » (diakonoi) institués au service des Chrétiens de langue grecque (Ac 6). Pourtant, il bénéficie d’une révélation personnelle qui fait de lui un Apôtre auprès des païens (cf. Ac 9 ; Ac 13,13).
Les disciples sont envoyés deux par deux (Luc 10,1). Cette organisation illustre la complémentarité des charismes : un binôme apporte davantage à ceux à qui il est envoyé qu’un disciple isolé. Une organisation (apôtres, disciples, binômes) qui a pour seul objectif l’annonce du Royaume de Dieu (Lc 10,9 : « Dîtes leur : ‘le royaume s’est approché de vous’ »). Autrement dit, c’est la réalité eschatologique du Royaume qui fonde et qui authentifie l’engagement des disciples. L’organisation mise en place n’est pas simplement humaine, elle annonce l’irruption d’une réalité nouvelle — la réalité du royaume de Dieu —, en fonction de laquelle toute chose sera évaluée.
C’est pourquoi le récit décrit les signes de puissance divine qui accompagnent l’action des disciples : guérisons (v. 9), expulsions de démons (v. 17). L’Évangile de Luc, comme tous les Évangiles, est une apocalypse, c’est-à-dire une révélation de l’imminence de la fin de l’histoire et des événements qui l’accompagnent. Comme toute apocalypse, l’Évangile de Luc décrit les « temps derniers », qui sont ceux de l’Église, temps qui sont caractérisés par un combat entre Jésus et les forces du mal (démons, maladies etc.). Dans ce combat, chacun est libre de se situer, ce qu’illustre l’attitude contrastée des villes et des villages auxquels sont envoyés les disciples : tantôt les accueillant (v. 8), tantôt les expulsant (v. 10-11).
Autrement dit, l’adhésion à Jésus-Christ, la participation à son projet, engage davantage que le présent. Adhérer au Christ, c’est consentir au sens qu’il donne à l’histoire tout entière, et c’est accepter que l’histoire des hommes reçoive de lui — Jésus-Christ — son sens plénier.
Reprenons les principaux points de ce parcours en Lc 10,1-20 :
- Le Christ appelle largement des disciples à participer à sa mission : annoncer le Royaume de Dieu qui vient donner un sens à l’histoire tout entière.
- Tous ceux qui acceptent de participer à la mission confiée par la Christ doivent ouvrir leur existence à une dimension plus large, plus risquée : accepter d’appartenir à un groupe de disciples que l’on n’a pas choisis, où se côtoient des personnes de toutes origines ; accepter de dépasser la logique d’une organisation humaine pour entrer dans la logique du Royaume, une logique qui renverse les apparences, puisque Jésus crucifié est proclamé Christ et Seigneur dans le Royaume de Dieu.
Source : Cahier des EDC Le principe de participation