Article de la revue

Dirigeants Chrétiens n°100 – Ensemble, entreprenons pour la maison commune

Publié le 07/03/2020

Ensemble, entreprenons pour la maison commune

(extraits de Dirigeants Chrétiens, n°100)

« Écologie intégrale. » L’expression peut susciter, au premier abord, une pointe de découragement. Le thème est si vaste. Comment, dans l’entreprise, amorcer cette conversion ? Or, agir, c’est d’abord se poser les bonnes questions : quelle est la raison d’être de mon entreprise ? Et moi, quel est le sens de mon métier ? Quel est l’impact de notre  activité sur les plus vulnérables ? Dans ce dossier, des personnalités du monde économique et ecclésial font part de leurs réflexions sur le sujet. Des chefs d’entreprise et des entrepreneurs livrent leur plan d’action.

 

 

 


Face au réchauffement climatique, quelle est la marge de manoeuvre des entreprises ? Leur
action passe-t-elle forcément par une conversion de regard sur l’innovation, la rentabilité et le
respect des plus fragiles ? Rencontre entre le père Thierry Magnin et Frédéric Van Heems pour
qui ces questions environnementales et sociales sont porteuses de sens.

Thierry Magnin,
secrétaire général
de la Conférence
des Évêques de France.

 

 

Frédéric
Van Heems,
directeur général
eau France de Véolia
depuis 2016, membre de
l’équipe EDC
Paris Notre-Dame-des-
Champs.

 


Témoignage

Fournir un service vital en situation de monopole impose des obligations morales

Cela fait plus de 30 ans que je suis aux EDC. C’est entre autres grâce à ce mouvement que j’ai progressivement orienté mes choix professionnels vers un capitalisme d’intérêt collectif. Aujourd’hui, mon métier consiste à gérer des systèmes d’alimentation en eau potable dans les pays en voie de développement (PVD) et à permettre aux acteurs locaux de s’approprier nos technologies de gestion en temps réel, pour les rendre les plus autonomes possible à  terme. Une mission qui me met sans cesse en lien avec des habitants de pays en première ligne des effets néfastes du  changement climatique. Pas question donc de les pousser à consommer plus : le fait de fournir un service vital en  situation de monopole impose des obligations morales. Nous assistons par exemple au dessèchement de zones insulaires comme Haïti. Avec les Haïtiens, notre métier s’inscrit dans l’efficacité mais aussi l’humilité et l’acceptation que le résultat n’est pas seulement financier, et même qu’il ne nous appartient pas. Nos solutions de gestion durable n’en sont pas si elles ne se sont pas refaçonnées par ceux qui doivent en être les premiers bénéficiaires.
A.W.


Regard de la pasteur Marion Heyl

L’espérance, promesse d’une nouvelle vie

Au départ de nos réflexions pour la préparation des prochaines assises nationales se trouve un constat partagé : celui d’importants changements en cours et à venir, et d’une urgence à redéfinir notre rapport au monde. Les échéances  que nous rappellent régulièrement les scientifiques face au changement climatique, les chiffres annoncés par les  organisations internationales quant au creusement des inégalités dans le monde, les tensions grandissantes entre nations qui sont bien souvent liées à des questions économiques et d’accès aux ressources, les avancées technologiques qui soulèvent des questionnements éthiques nouveaux, la fragilité du système financier international ainsi que nos propres expériences et questionnements au quotidien nourrissent une angoisse face à ce monde qui change et dont on ne sait pas à quoi il ressemblera demain. Notre maison commune est ébranlée et bien souvent nous nous sentons démunis face à ce constat.

Plusieurs possibilités s’offrent alors à nous : le déni et le refuge dans le confort de la continuité ; la peur qui le plus souvent paralyse ou amène à ériger des barrières ; l’espérance qui met en route.

 


Billet du conseiller spirituel national

Des usufruitiers actif

Dieu nous a donné en héritage la création où il nous a confié un rôle particulier. C’est pourquoi il convient de « reconnaître que nous ne sommes pas les maîtres de la Terre mère, mais ses fils et ses filles, formés de la poussière de la terre (Gn 2, 7-8), ses hôtes et pèlerins (1 P 1, 17b et 1 P 2, 11), appelés à devenir ses zélés gardiens (d’après Gn 1, 26) » (Pacte des Catacombes, 2, Rome, 20 octobre 2019).

Le jardin en Eden, espace ouvert, devait pourvoir à tous les besoins de l’homme non sans l’atteler à la tâche de le cultiver. Malheureusement, le comportement des êtres humains a altéré une relation équilibrée. Au fil des siècles, ils ont développé leur emprise sur la terre sans prendre toujours conscience de leur capacité à détruire alors qu’ils déployaient leur désir d’innover et de créer. La maison commune censée abriter l’humanité s’en est trouvée fragilisée : « Le défi urgent de sauvegarder notre maison commune inclut la préoccupation d’unir toute la famille humaine dans la recherche d’un développement durable et intégral, car nous savons que les choses peuvent changer » (Laudato Si’, 13).