Fiche point de repères – L’Entreprise est-elle une communauté ?
Publié le 26/03/2020Télécharger ici en format PDF la fiche points de repères
Dans la prolongation des débats autour de la « raison d’être », des entreprises à mission et même de l’économie du Bien commun, une question vient spontanément : l’entreprise peut-elle se penser comme une communauté ? La réponse est essentiellement anthropologique. Si on considère l’homme comme isolé et uniquement centré sur ses seuls intérêts, il sera difficile de créer une communauté. Si au contraire, on pense l’homme comme un être de relations, ouvert aux autres et qui se réalise dans le don alors s’ouvrent de nouvelles perspectives… à nous de choisir !
1/ TOUTES LES APPARENCES SONT CONTRE …
Difficile de penser l’entreprise comme une communauté. Toutes les apparences sont contre…
- Conçue comme une organisation, l’entreprise nécessite la division des tâches et du travail. L’organisation distingue pour unir… alors que la communauté, elle, commence d’abord par considérer ce qui est commun avant de diviser.
- Ensuite, en parlant d’entreprise, on pense immédiatement à ce nœud de contrats qui, parce qu’ils sont juridiquement verrouillés, empêchent les salariés de vivre vraiment la communauté.
- Mais ce n’est pas tout : il y a une tension entre capital et travail. Vraie ou fausse, cette tension peut-être mal vécue. Comment créer une communauté malgré cette tension ?
- Pour finir le mot « communauté » peut faire peur… il est souvent synonyme d’enfermement, de communautarisme, d’aliénation même de la liberté.
2/ ET POURTANT …
L’entreprise est bien une communauté au sens de la mise en commun de biens et de l’industrie – le travail- de deux ou plusieurs personnes (art. 1832 du CC). Cela doit nous nourrir de rappeler ce but. L’un des problèmes de notre monde, c’est d’avoir considéré que cela n’était pas important.
Le mot communauté marque le fait d’être ensemble. Les interactions entre les membres génèrent un « nous » qui est plus que la somme des individus (bénéfice ou économie). Voir la communauté en entreprise, c’est chercher ce qui est « commun » entre ses membres, quels que soient son poste, ses compétences, ses responsabilités, en sachant que l’intérêt économique n’est pas généralement considéré comme le seul élément commun significatif. Une communauté est plus que l’agrégation d’intérêts communs ; elle a une identité qui se manifeste notamment dans le but, la mission, qui l’anime de manière explicite ou implicite. Dans cet esprit, la réflexion autour de la « raison d’être » de l’entreprise est une véritable opportunité. Enracinée, différenciante et engageante, cette raison d’être doit être le fruit d’un travail collaboratif et devenir un outil au service du projet commun de l’entreprise.
3/ QUELQUES QUESTIONS
Plusieurs questions se posent autour de la mise en place de la communauté en entreprise :
La communauté ou les communautés ? il y a un danger de voir les différentes communautés s’éloigner de la communauté et même quelques fois de se penser comme différentes ! Pour le dirigeant, voici trois pistes pour y remédier :
- Piloter au travers d’une vision commune et partagée.
- Être attentif à l’encadrement intermédiaire
- Faire jouer la subsidiarité
La question de l’articulation entre communauté et propriété… La notion même de propriété est à réinterroger car elle devient problématique dès lors qu’elle se considère comme un droit absolu sans considérer les responsabilités qui y sont attachées. La propriété nous est confiée pour la faire grandir autour du bien commun.
- Pour mieux organiser les choses et éviter des dérives, la présence de contre-pouvoirs est un levier fort.
- Par ailleurs, il faut, autant que possible, mettre en place des moyens permettant à chacun de pouvoir se sentir sinon propriétaire, au moins partie prenante de l’entreprise.
4/ DE QUELLE COMMUNAUTÉ PARLE-T-ON ?
Beaucoup de notions recouvrent le terme de communauté. Dans une entreprise, la communauté se superpose à l’organisation et n’est pas visible dans l’organigramme.
En fait, il y a communauté lorsque les variables suivantes sont combinées :
- Un engagement libre et volontaire autour d’une finalité commune
- L’existence de relations stables et durables entre les membres
- Une identité et une culture partagée
- Chaque membre est lié par un sentiment d’appartenance
- Même si dans une communauté personne n’est seul, il y a une autonomie de chacun des membres
- Respect de règles ou de normes qui sont régulièrement réinterrogées
- Des ressources partagées
Pour en savoir plus : https://www.cairn.info/revue-management-et-avenir-2009-10-page-30.htm et Dirigeants Chrétiens n°89 de mai-juin 2018 : « L’entreprise, une communauté solidaire ? ».