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L’incarnation du Christ, sommet de la solidarité

19 février 2024 Eclairages spirituels
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Avec la nouvelle alliance, ce n’est plus un prophète qui est envoyé, c’est Dieu lui-même qui vient. Le Verbe, la deuxième personne de la Trinité, se fait chair et vient vivre la condition des hommes. Il s’anéantit, dit Paul dans les Philippiens. C’est la kénose du Fils (ekenôsen) : « Mais il s’est dépouillé (ekenôsen), prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes, et, reconnu à son aspect comme un homme, il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, à la mort sur une croix. » (Ph 2,7-8 TOB)

 

Le terme grec ekenôsen (exinanivit signifie en latin : il s’est vidé de sa substance) désigne à la fois l’abaissement du Christ et la cause de salut ; c’est une manifestation extrême de solidarité. Le Christ a pris sur lui le péché, il s’est fait péché pour nous selon l’expression de la seconde épître aux Corinthiens : « Celui qui n’a point connu le péché, il l’a fait devenir péché pour nous » (2 Co 5,21.)

 

Le Christ initie une solidarité dans le bien qui répond à une forme de solidarité dans le mal initié par le premier homme. La faute d’Adam établit la condition humaine dans un état de péché mais en retour, il suffit d’un homme juste, le Christ, Fils de Dieu, vrai Dieu et vrai homme, pour rétablir la justice de la multitude : « De même en effet que, par la désobéissance d’un seul homme, la multitude a été rendue pécheresse, de même aussi, par l’obéissance d’un seul, la multitude sera-t-elle rendue juste » (Rm 5,19.)

 

Cette solidarité dans le bien est ultime : Le bon berger donne sa vie pour ses brebis. Il ouvre une voie d’une exigence totale qui nous appelle à un regard renouvelé sur nos collaborateurs, sur nos frères.

 

La croix établit un lien inimaginable entre Dieu et les hommes : « Une fois élevé de terre, j’attirerai tout à moi. » (Jn 12,32.) Nous sommes en présence de ce que les théologiens n’ont pas hésité à appeler un admirable échange : « Ô admirable échange ! Le créateur du genre humain, prenant un corps d’homme, a accepté de naître d’une vierge. Et le voici, homme sans père ici-bas, qui nous dispense sa divinité. » (1ère antienne des vêpres de la Vigile de Noël.)


L’expression provient de saint Augustin, Dans un sermon célèbre (Sermon 233, 4.) l’évêque d’Hippone voit dans le Christ un marchand qui échange sa divinité contre notre humanité. L’analogie, certes, n’est pas parfaite, car le Christ conserve sa condition divine. Mais en se faisant homme, il renonce, selon les mots de Paul aux Philippiens, à son rang : « il n’a pas retenu jalousement le rang qui l’égalait à Dieu ». (Ph 2,6.)


Saint Augustin s’exprime en ces termes : « Ce divin marchand (mercator) nous a apporté de son pays des biens inestimables, et il a trouvé dans le pays que nous habitons ce qu’il produit en abondance. Qu’avons-nous ici en abondance ? La naissance et la mort. Voilà les produits dont la terre est couverte : des naissances et des morts. Il est né, et il est mort. Mais comment est-il né ? Il est venu dans ce pays, mais non pas en suivant la voie par laquelle nous y
sommes entrés, car il est descendu du ciel et du sein de son Père » (Sermon 233, 4).


Le Compendium de la Doctrine Sociale de l’Église montre combien le Christ est le modèle indépassable de toute vie solidaire : « Le sommet insurmontable de la perspective indiquée est la vie de Jésus de Nazareth, l’Homme nouveau, solidaire de toute l’humanité jusqu’à la « mort sur la croix »
(Ph 2, 8) : en lui il est toujours possible de reconnaître le Signe vivant de cet amour incommensurable et transcendant du Dieu-avec-nous, qui prend sur lui les infirmités de son peuple, chemine avec lui, le sauve et le constitue dans
l’unité (Gaudium et spes 32.).

 

En lui, et grâce à lui, la vie sociale aussi peut être redécouverte, même avec toutes ses contradictions et ambiguïtés, comme lieu de vie et d’espérance, en tant que signe d’une grâce qui est continuellement offerte à tous et qui invite aux formes de partage les plus élevées et les plus engageantes.

 

Jésus de Nazareth fait resplendir devant les yeux de tous les hommes le lien entre solidarité et charité, en en éclairant toute la signification (Jean-Paul II, Sollicitudo Rei Socialis 40 : « La solidarité est sans aucun doute une vertu chrétienne. Dès le développement qui précède on pouvait entrevoir de nombreux points de contact entre elle et l’amour qui est le signe distinctif des disciples du Christ (cf. Jn 13,35) ») : à la lumière de la foi, la solidarité tend à se dépasser elle-même, à prendre les dimensions spécifiquement chrétiennes de la gratuité totale, du pardon et de la réconciliation. Alors le prochain n’est pas seulement un être humain avec ses droits et son égalité fondamentale à l’égard de tous, mais il devient l’image vivante de Dieu le Père, rachetée par le sang du Christ et objet de l’action constante de l’Esprit Saint. Il doit donc être aimé, même s’il est un ennemi, de l’amour dont l’aime le Seigneur, et l’on doit être prêt au sacrifice pour lui, même au sacrifice suprême : “Donner sa vie pour ses frères” » (cf.1 Jn 3, 16).


L’évangile présente de nombreuses illustrations de cette solidarité. Dans l’Évangile du paralytique à Capharnaüm, les amis du malade font preuve d’une solidarité forte et déterminée. Ils mettent tout en œuvre pour accéder à Jésus et, en voyant leur foi, celui-ci pardonne puis guérit l’homme couché sur la civière.


Autre exemple, la multiplication des pains dans l’Évangile de Jean (Jn 6,1-16.) : un jeune homme donne le peu qu’il avait pour son propre repas. Il l’offre pour la foule : « Qu’est-ce que cela pour tant de monde ? » s’étonnent les disciples. Jésus répond : « Faites asseoir les gens ! » l’indigence suffit parce qu’elle est remise entre les mains du Christ. Les pratiques égoïstes, captatrices, vénales rendent l’univers trop petit pour les hommes. Le cœur de l’homme est fait pour embrasser large, pour veiller au bien de tous et il est donc ouvert à la solidarité.

 

Le jeune homme de l’Évangile ouvre son sac et partage son pique-nique avec une efficacité inimaginable. Le don, la solidarité, la droiture non seulement donnent de la joie mais ils sont signes du Royaume qui vient. On pourrait aussi prendre comme exemple la prière universelle dans la liturgie : la prière, lorsqu’on célèbre l’eucharistie, la cène, ne peut être qu’universelle : le Christ a livré son corps pour la multitude : ce sont les paroles mêmes de Jésus : « car ceci est mon sang, le sang de l’Alliance, versé pour la multitude (pollôn), pour le pardon des péchés. »
(Mt 26,28)

 

Source : Cahier des EDC La solidarité dans l'entreprise




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