Reportage

Saga d’une folie montpelliéraine : le château de Flaugergues

Publié le 25/04/2017

Une centaine de couverts étaient réservés ce premier jour d’été au château de Flaugergues. Dans cette « folie », maison de plaisance au cœur de Montpellier, la famille Colbert gère un patrimoine, le restaurant Folia, un vignoble, et des jardins dits remarquables avec une vingtaine de salariés. « Un lieu de culture, fruit de mariage passionné entre la nature et la culture » aime à rappeler le propriétaire.

Rencontre avec Marie de Colbert, membre depuis un an de l’équipe EDC Montpellier Guilhem et gérante du restaurant et des réceptions au château de Flaugergues. Rencontre aussi avec son beau-père Henri de Colbert. Pour préserver le patrimoine et le vignoble, il témoigne des différentes anxiétés, comme celles de tous les propriétaires actuels riches en terres mais pauvres en liquidités, et du soutien apporté par son équipe EDC.

Préserver une folie au coeur de la ville

Mener une activité agricole et de tourisme, pour préserver cette folie montpelliéraine de la fin du XVIIe siècle, engendre des responsabilités souvent lourdes à porter. « Difficultés en particulier issues d ’incertitudes financières, confie Henri de Colbert. Le risque financier du patron indépendant est son propre risque et celui de sa famille. » Pourtant, depuis 30 ans, ces efforts ont abouti, le château ainsi que le jardin et le vignoble ont été classés monument historique en 1986. Cette année ce site d’exception en plein cœur de la ville vient de recevoir une deuxième étoile au Guide Vert Michelin.
Pour protéger ce patrimoine, le propriétaire se préoccupe toujours autant. La conversation est souvent ponctuée de moments d’inquiétude. Henri de Colbert attendait des nouvelles d’un financement que Pierre, son fils, voulait obtenir pour développer l’activité viticole.
« Nous sommes propriétaires sur le papier, mais le lieu et l’histoire qu’il représente appartiennent à tous. Nous en sommes les administrateurs au service de l’intérêt général. » La famille Colbert a appris à vivre pour ce lieu, en acceptant de croiser des touristes en sortant de la chambre.

Une famille au travail

Henri de Colbert reprend le château familial à la mort de son oncle sans descendants et décide, avec Brigitte, tout d’abord de s’installer sur place avec leurs quatre enfants et une idée en tête : faire du bon avec du beau et créer des emplois. La famille est entièrement impliquée dans la gestion des différentes activités, avec pour mission de main- tenir ce patrimoine coûte que coûte. « Quand vous savez qu’ils n’ont pas rem- placé la chaudière depuis plusieurs hivers par économie, vous comprenez le dévoue- ment » glisse le guide à la fin de la visite du château. Henri a souvent lutté avec les collectivités, les banques, les services de l’État et s’est plusieurs fois retrouvé face au dilemme de vendre des terrains. Aujourd’hui, c’est la prochaine génération, avec Marie et Pierre, qui reprend le flambeau en donnant une nouvelle jeunesse à ce lieu avec la création en 2010 du restaurant Folia, en organisant des after works, en accueillant des séminaires et des réceptions. Pierre a repris l’exploitation viticole d’une superficie de 25 ha. 160 000 bouteilles sont produites au château chaque année. 65 % sont vendues à l’export dans 17 pays, dont 30 % en Chine.

« C’est une chance d ’avoir été soutenu pour créer le restaurant. On s’est chargé de l ’investissement de la partie exploitation. Nous nous sommes associés avec quelqu’un du métier, le chef Thierry Alix que Pierre avait rencontré. Il nous apporte sa compétence et sa cuisine fait partie du succès du restaurant. » raconte Marie de Colbert. Ce lieu est incarné par la famille, les clients s’y attachent. Marie et Pierre tissent des liens forts avec leur clientèle très fidèle. Ouvert le midi en semaine, ce sont les Montpelliérains travaillant aux alentours qui viennent déjeuner régulièrement.

« Le restaurant nous fait vivre et il valorise le lieu. C’est notre revenu et il nous permet d’être plus détendus sur les autres activités moins rémunératrices. » La veille, Marie avait terminé peu avant minuit, s’est levé tôt ce matin pour cuire les croissants et prépare déjà le prochain service de 130 couverts. Pierre travaille également sur place et donne souvent un coup de main au moment critique. « C’est un lieu de vie et un lieu de travail, ce n’est pas le tout de ma vocation. » com- mente Marie de Colbert. Sans doute tient-elle ce recul d’un positionnement intérieur. « Cette année a été spéciale : j’ai rencontré le pape François en audience privée le 1er mars dernier avec une délégation de politiques et de membres de la société civile, je me suis engagé aux EDC et j’ai également fait un pèlerinage. » Chrétienne et dirigeante, Marie trouve un sens à son activité : « Le simple fait d ’avoir une activité professionnelle, ça fait sens. Il faut contribuer à nourrir sa famille. Ici, ça prend un sens plus particulier : celui du développement économique avec la joie d’avoir créé une activité nouvelle qui fonctionne et celui, plus global, du château qu’il faut maintenir en activité. Vous me posez la question si mes collaborateurs peuvent répondre de mon management chrétien, je n’en suis pas encore là! J’espère du moins qu’ils perçoivent une joie intérieure » lâche-t-elle en souriant.

«Mes démarches ne doivent pas être différentes entre la vie et le travail.»

L’apport de la vie d’équipe EDC

Se posant souvent la question de prendre les bonnes décisions, Marie de Colbert, la quarantaine, trouve im- portant l’apport de son équipe EDC pour renforcer son positionnement. Elle ressent de l’apaisement quand elle arrive à relier sa vie, à être cohérente. « Mes démarches ne doivent pas être différentes entre la vie et le travail » s’efforce-t-elle. Elle accueille toutes les réunions d’équipe au château, pour le côté « pratique ». « Spontanément, je ne me suis pas dit que les EDC étaient pour moi. Je les associais à la génération d ’au-dessus pour des dirigeants avec des vraies fonctions de managers et de chefs d ’entreprise. Mon père et mon beau-père ont été membres. Je ne me projetais pas spécialement alors qu’en pratique mon quotidien est bien celui d ’un chef d ’entre- prise. Olivier Martin-Rouville, un bon ami, a pris la présidence de l’équipe et j’ai décidé de la rejoindre » confie Marie. Henri de Colbert est convaincu que le partage vécu en équipe aux EDC lui a permis d’avancer dans des périodes de découragement. « En partageant mes difficultés avec l ’équipe, nous avons pu construire des solutions que je n’avais pas envisagées. Cette écoute attentive m’a per- mis de sortir du sentiment d ’impuissance et de changer positivement les événements, raconte-t-il, avant de conclure : Le témoignage que nous portons en tant que patron chrétien est important. Il faut dépasser les clichés en vivant le rôle du patron au service de l’intérêt général. »

Jean-Baptiste Deau