Le principe de participation trouve sa source dans le principe socle de la Pensée Sociale Chrétienne, la dignité de l’homme. En effet, elle tire les conséquences concrètes de la confiance que la Pensée Sociale Chrétienne place dans la personne humaine capable d’agir en toute liberté et responsabilité au service du bien commun. Cette confiance « s’exprime essentiellement en une série d’activités à travers lesquelles le citoyen, comme individu ou en association avec d’autres, contribue à la vie culturelle, économique, sociale et politique de la communauté civile à laquelle il appartient. »1.
Si le principe de participation est en cohérence avec tous les autres principes de la Pensée Sociale Chrétienne Il est particulièrement lié au principe de subsidiarité dont il est à la fois la conséquence et la condition d’exercice.2
Le principe de participation demande donc que chacun s’investisse dans la vie de chacune des communautés auxquelles il appartient. Plus profondément il signifie que la création de Dieu continue à travers chacun de nous. En effet, « pour les croyants, une chose est certaine : l’activité humaine, individuelle et collective, le gigantesque effort par lequel les hommes, tout au long des siècles, s’acharnent à améliorer leurs conditions de vie, considéré en lui-même, correspond au dessein de Dieu ».3
L’homme, créé à l’image de Dieu, participe par son travail à l’oeuvre du Créateur
« Dans les paroles de la Révélation divine, on trouve très profondément inscrite cette vérité fondamentale que l’homme, créé à l’image de Dieu, participe par son travail à l’œuvre du Créateur, et continue en un certain sens, à la mesure de ses possibilités, à la développer et à la compléter. »4
La conscience de participer par son action à l’œuvre de la création est une motivation profonde. « La conscience que le travail humain est une participation à l’œuvre de Dieu doit (…) imprégner même les activités les plus quotidiennes. Car ces hommes et ces femmes qui, tout en gagnant leur vie et celle de leur famille, mènent leurs activités de manière à bien servir la société, sont fondés à voir dans leur travail un prolongement de l’œuvre du Créateur, un service de leurs frères, un apport personnel à la réalisation du plan providentiel dans l’histoire».5 Ainsi « Le message chrétien ne détourne pas les hommes de la construction du monde et ne les incite pas à se désintéresser du sort de leurs semblables: il leur en fait au contraire un devoir plus pressant».6
Le principe de participation ne se comprend que dans la relation aux autres
Dans la Pensée Sociale Chrétienne, la participation ne se comprend que dans la relation aux autres. En effet, l’homme est fait pour donner et se donner. Celui qui se donne se trouve. Celui qui ne se donne pas se perd. L’homme n’est pleinement lui-même que quand il donne et se donne. Guillaume de Saint Thierry écrit : « L’énergie principale qui anime l’âme humaine est l’amour. La nature humaine, dans son essence la plus profonde, consiste à aimer. En définitive, une seule tâche est confiée à chaque être humain : apprendre à aimer, sincèrement, authentiquement, gratuitement. Mais ce n’est qu’à l’école de Dieu que cette tâche est remplie et que l’homme peut atteindre l’objectif pour lequel il a été créé. »7
« La participation est un devoir que tous doivent consciemment exercer, d’une manière responsable et en vue du bien commun. »8 Il demande :
- L’implication libre de chacun. Chacun acceptant de prendre et d’assumer des responsabilités : « La participation est l’engagement volontaire et généreux de la personne dans les échanges sociaux. Il est nécessaire que tous participent, chacun selon la place qu’il occupe et le rôle qu’il joue, à promouvoir le bien commun. Ce devoir est inhérent à la dignité de la personne humaine. ».9
- Il s’applique d’abord dans la prise en charge des domaines dont chacun est responsable. « La participation se réalise d’abord dans la prise en charge des domaines dont on assume la responsabilité personnelle : par le soin apporté à l’éducation de sa famille, par la conscience dans son travail, l’homme participe au bien d’autrui et de la société ».10
C’est la notion, aujourd’hui un peu oubliée, du devoir d’état qui désignent les obligations particulières de chacun liées à son état, sa condition et la situation qu’il occupe. - Mais il invite aussi à étendre son action à d’autres domaines de la vie sociale car l’action du chrétien ne peut « être délimitée ou restreinte à quelques contenus particuliers de la vie sociale ».11
Le principe de participation est un appel à agir au-delà des responsabilités directes et à agir dans les différents domaines de la vie publique.12
L’Eglise insiste particulièrement sur la participation de tous à la vie politique.
L’Eglise insiste particulièrement sur la participation de tous à la vie politique. « La participation à la vie communautaire n’est pas seulement une des plus grandes aspirations du citoyen, appelé à exercer librement et de façon responsable son rôle civique avec et pour les autres, mais c’est aussi un des piliers de toutes les institutions démocratiques, ainsi qu’une des meilleures garanties de durée de la démocratie. »13
La participation est aussi un droit. Il revient à ceux qui exercent la charge de l’autorité de créer les conditions qui rendront plus faciles la mise en œuvre de la participation. Nous retrouvons là la mise en œuvre de la subsidiarité. En particulier il est de la responsabilité des dirigeants comme des managers de :
- Donner le cadre dans lequel chacun doit exercer son rôle. Chaque collaborateur participera d’autant mieux qu’il connaitra et comprendra toujours davantage ce cadre : les enjeux, les objectifs et la stratégie de l’entreprise ; les responsabilités qui lui sont confiées et les règles à respecter. Une attention toute particulière sera donné à « Affermir les valeurs qui attirent la confiance des membres du groupe et les incitent à se mettre au service de leurs semblables ».14
- Former chacun afin qu’il acquière les compétences nécessaires à l’exercice de son rôle. Cette formation devient de plus en plus importante car « l’homme (…) quand il veut se servir de cet ensemble d’instruments modernes, c’est-à-dire des moyens de production, doit commencer par assimiler, au plan de la connaissance, le fruit du travail des hommes qui ont découvert ces instruments, qui les ont programmés, construits et perfectionnés, et qui continuent à le faire. La capacité de travail – c’est-à-dire la possibilité de participer efficacement au processus moderne de production – exige une préparation toujours plus grande et, avant tout, une instruction adéquate. »15
- Veiller à l’intégration des plus faibles : « Dans cette perspective, devient incontournable l’exigence de favoriser la participation, surtout des plus défavorisés, et l’alternance des dirigeants politiques, afin d’éviter l’instauration de privilèges occultes ; en outre, une forte tension morale est nécessaire, pour que la gestion de la vie publique soit le fruit de la coresponsabilité de chacun vis-à-vis du bien commun. »16
Source : Cahier des EDC Le principe de participation
- Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise, §189 ↵
- Dans son livre l’éthique économique Arthur Rich (Voir note 30 page 11) analyse sept critères, qui fondent la justice économique. Dans cette liste qui n’est pas limitative – la liste reste ouverte – la participation (all. Partizipation) est le septième. Notons que pour Rich, si les autres critères ont leurs racines dans le Nouveau Testament, il considère qu’il n’en va pas de même de la participation. En effet, les enjeux de la participation sont pour lui en marge à l’époque du christianisme primitif. « En effet, cette époque était caractérisée par une attente eschatologique précise, par la certitude que “la figure de ce monde” allait passer et que la venue du royaume de Dieu était imminente. Cette certitude rendait nécessairement obsolète toute question de changement de structure sociale, pour autant que de telles questions se soient déjà posées à ce moment-là. Dans le Nouveau Testament, l’aspect structurel et social de l’éthique est donc presque entièrement occulté par celui de l’éthique personnelle. » ↵
- Gaudium et Spes §34.1 ↵
- Laborem Exercens, §25 ↵
- Laborem Exercens §25 ↵
- Laborem Exercens §25 ↵
- Guillaume de Saint Thierry (1085- 1148) dans sa « lettre d’or ». Cité par Benoit XVI le 2/12/2009 ↵
- Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise, §189 ↵
- Catéchisme de l’Eglise Catholique §1913 ↵
- Catéchisme de l’Eglise Catholique §1914 ↵
- Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise, §189 ↵
- « Les citoyens doivent autant que possible prendre une part active à la vie publique. Les modalités de cette participation peuvent varier d’un pays ou d’une culture à l’autre. » Il faut louer la façon d’agir des nations où, dans une liberté authentique, le plus grand nombre possible de citoyens participe aux affaires publiques » (Gaudium et Spes 31, § 3). ↵
- Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise, §190. Le texte poursuit ainsi : « De fait, le gouvernement démocratique est défini à partir de l’attribution, par le peuple, de pouvoirs et de fonctions, qui sont exercés en son nom, pour son compte et en sa faveur; il est donc évident que toute démocratie doit être participative.Cela comporte que les sujets de la communauté civile, à tous ses niveaux, soient informés, écoutés et impliqués dans l’exercice des fonctions qu’elle remplit. » ↵
- Catéchisme de l’Eglise Catholique §1917 ↵
- Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise, §189 ↵
- Compendium de la Doctrine Sociale de l’Eglise, §189 ↵