Eclairage spirituel

Derrière la question du sens se trouve celle de la vocation

Publié le 01/03/2019

L’homme trouve du sens là où il répond à sa vocation. Pour cela, chacun est appelé à faire croître et prendre soin.

Les débuts de la vie professionnelle sont un temps tout aussi fondamental pour le discernement de sa vocation que celui de l’enfance, tout en le formulant en d’autres termes. Si l’enfant se projette et se demande « Que ferai-je plus tard ? », le jeune actif, la trentaine à portée de main ou fraîchement dans le rétroviseur, se demande « Que suis-je en train de faire ? »

Derrière ce questionnement est éprouvé un manque accompagné d’un sentiment de confinement, d’inutilité, voire d’incohérence. Après discernement, ils peuvent révéler une vocation contrariée. Une vie professionnelle inadéquate risque de freiner ou d’empêcher la réponse à ’appel fondamental de Dieu à l’homme : faire croître et prendre soin. De cette confrontation surgit du non-sens.

Par l’action de cultiver, l’homme est appelé à faire croître, déployer et fructifier le jardin d’Eden plutôt que de le conserver précautionneusement en l’état.

Le livre de la Genèse nous le rappelle : « Le Seigneur Dieu prit l’homme et le conduisit dans le jardin d’Eden pour le cultiver et le soigner » (Gn 2, 15). Dans cette traduction, d’influence hébraïque, les verbes « cultiver » et « soigner » sont préférés à ceux de la traduction liturgique « travailler » et « garder ». La nuance n’est pas des moindres. Par l’action de cultiver, l’homme est appelé à faire croître, déployer et fructifier le jardin d’Eden plutôt que de le conserver précautionneusement en l’état. La dynamique est similaire à celle de la parabole des talents (Mt 25, 14-30). Adressé à tous, l’appel de Dieu à « cultiver » est indissociable de celui de « soigner ». Si bien que toute croissance qui ne prend pas soin mais brutalise ou dégrade devient une régression anthropologique. L’homme, en l’exerçant, s’éloigne de lui-même et perd le sens de son activité.

La recherche de sens des jeunes dans le travail est prophétique. Au fond, leurs interrogations visent à conjuguer la « croissance » avec le « soin » : une croissance qui prend soin du lien social, du rythme familial, de la création et du frère de l’autre hémisphère… Leur recherche de sens dans le travail ne pose pas uniquement la question de leurs vocations, « comment et où vais-je faire croître et prendre soin ? », mais interpellent celles de ceux qui sont légèrement plus âgés. Par les changements que les jeunes initient, à nous, les aînés parfois trop ramassés sur nos certitudes d’insensés, de leur emboîter le pas et de répondre avec eux à la vocation originelle de l’Eden, associer « croissance » et « soin » dans les structures économiques, sociales et ecclésiales.

P. Régis Peillon,
responsable pastorale étudiante, réseau Ecclesia Campus, aumônier national de Chrétiens en grandes écoles