Actualité des EDC

Fiche Points de Repères sur le Grand débat national

Publié le 21/01/2019

Téléchargez ici la fiche Points de repères « Grand débat national »

1/ Notre rôle de Dirigeants Chrétiens

Nous sommes à la fois des dirigeants, habitués à prendre des décisions, souvent seuls pour ce faire, et des chrétiens appelés à vivre la fraternité avec les autres, tout particulièrement les pauvres, ceux qui souffrent, et à témoigner de notre espérance.

L’un n’est pas avant l’autre, ni ne doit en être séparé. Cela doit pour nous fonctionner ensemble, au contraire, en augmentant nos capacités de dirigeants et nos engagements de chrétiens en parallèle.

Nous sommes donc appelés à vivre et à agir en tant qu’EDC dans l’entreprise et au-delà, dans la société, par la prière d’abord, la compassion ou la compréhension ensuite, l’action enfin, car ce sont nos actes qui nous font reconnaître chrétiens dans la vérité.

La Pensée sociale chrétienne ne prend son sens que si nous agissons dans le monde, éclairés par elle, mais non pré-déterminés. Comme dans l’épître à Philémon, où Paul le renvoie à sa conscience à l’égard de son esclave Onésime, entre la règle du monde romain, qui applique la peine de mort à un esclave en fuite, et celle du Christ, qui en a fait un frère par son baptême… A lui de se débrouiller et de décider, en conscience, dans cette tension qui est souvent la nôtre…

Nous aussi, nous avons notre croix à porter, des lignes jaunes à ne pas franchir, dans nos entreprises. Mais nous avons également à aller plus loin, à nous exprimer dans la vie de la cité, politiquement, sur des orientations plus générales qui peuvent être porteuses d’espérance.

Contribuer à inventer avec les autres ces « solutions d’espérance » est notre rôle dans l’actualité.

Le débat intervient dans un contexte où les avis sont pluriels, parfois divergents, et difficiles à rapprocher. Le résultat ne sera sans doute pas parfait. Mais Benoît XVI écrivait déjà en 1987 : « Afin de maintenir la démocratie pluraliste, c’est à dire afin de maintenir et développer une mesure de justice humainement possible, il est urgent d’apprendre de nouveau à avoir le courage de l’imperfection et à connaître une menace constante qui pèse sur tout ce qui est humain. Seuls sont moraux les programmes qui suscitent ce courage. En revanche, le moralisme apparent, qui ne veut se contenter que de ce qui est parfait, est immoral. »[1]

Nous pouvons intervenir soit en méthode, pour aider à l’animation de débats et dialogues, par exemple dans les mairies, dans les paroisses ou dans des lieux ouverts ; soit sur le fond pour éclairer les questions posées, les objectiver et permettre d’avancer vers des propositions solides, complètes et argumentées.

Certains considèrent que les entreprises ne sont pas vraiment interpellées par les revendications entendues, mais il ne faut pas oublier que l’entreprise est un lieu de socialisation, une communauté de personnes, où l’on peut se rencontrer et parler, parfois le seul lieu d’écoute pour les personnes isolées. Et il nous appartient d’être attentifs aux attentes de nos collaborateurs en la matière, pour déceler et traiter les injustices ou les souffrances avant qu’elles ne soient devenues insupportables, avec l’aide des intervenants qualifiés extérieurs si nécessaire, tout ne dépendant pas de l’entreprise.

2/ L’organisation du débat national

Le débat était prévu pour aborder 4 thèmes principaux pendant deux mois :

  •  « Mieux accompagner les Français pour se loger, se déplacer, se chauffer », 
  • « rendre notre fiscalité plus juste, plus efficace, plus compétitive », 
  • « faire évoluer la pratique de la démocratie »,
  • « rendre l’État et les services publics plus proches des Français et plus efficaces ».

Dans sa Lettre aux Français, publiée le 13 janvier 2019, le Président de la République propose d’organiser le débat national sur les mêmes quatre thèmes désormais intitulés :

  • Nos impôts, nos dépenses et l’action publique,
  • l’organisation de l’État et des collectivités publiques,
  • la transition écologique,
  • la démocratie et la citoyenneté.

Une trentaine de questions sont d’ores-et-déjà posées dans ce texte, mais d’autres peuvent être ajoutées durant le débat et « il n’y a pas de questions interdites ».

Le Président de la République annonce également qu’il décidera en fonction des propositions qui émaneront du débat : « Ce débat est une initiative inédite dont j’ai la ferme volonté de tirer toutes les conclusions ». Pour lui l’objectif est clair : « transformer avec vous les colères en solutions ».

Une plateforme sur Internet est ouverte depuis le 15 janvier : https://granddebat.fr/

Trois types de contributions sont proposés :

  • soit l’organisation de réunions spécifiques, à inscrire sur le site pour les faire connaître et en rapporter les conclusions ;
  • soit la participation à des réunions programmées « près de chez vous » sur la base d’une carte qui montre toutes les initiatives déjà prises ;
  • soit contribuer sur le fond par un écrit pouvant être mis en ligne à partir du 21 janvier.

En tant qu’EDC, nous pouvons chercher à participer à des réunions avec des partenaires locaux (CPME, Medef, ou autre) ou monter des réunions spécifiques si nécessaire pour animer le débat sur les thèmes qui nous intéressent le plus et avec la méthode proposée (voir plus loin).

Après quelques semaines, il pourrait être envisagé de rassembler les principales conclusions dans une contribution du mouvement sur la plateforme nationale.

3/ Les questions de fond posées dans l’actualité

Les revendications mises en avant au cours des derniers mois sont nombreuses et variées. Les principales touchaient à des sujets très concrets et touchant de loin aux entreprises :

  • hausse des taxes sur les carburants, dans l’absolu et en différentiel entre gazole et essence ;
  • hausse de la CSG, notamment pour les retraités qui ne bénéficient pas des baisses de cotisations sociales des salariés ;
  • moindre augmentation des minima sociaux, désormais non indexés sur l’inflation ;
  • augmentation du risque de pauvreté, soit réelle, soit crainte pour l’avenir ou pour celui de ses enfants et petits-enfants.

Tous ces sujets sont plutôt du ressort de l’Etat et des organismes publics.

Mais d’autres nous concernent plus directement en tant qu’entrepreneurs et dirigeants :

  • mise en œuvre de la transition énergétique pour les entreprises et les particuliers ;
  • difficulté à vivre décemment de son travail, tant pour les salariés pauvres que pour les artisans, agriculteurs ou indépendants ;
  • isolement ou exclusion d’un monde qui semble aller trop vite, par ailleurs, du fait de la mondialisation, de la numérisation et des transformations du travail qui en résultent ;
  • crainte (ou réalité) des pertes d’emplois et du chômage ;
  • concurrence réelle ou supposée des migrants sur l’emploi en France ;
  • concurrence des produits étrangers arrivant dans tous nos commerces…

D’autres questions plus politiques se sont ajoutées à celles du départ, sous la pression de personnes plus politisées, voire anarchistes, qui demandent la démission du Président de la République, des réformes constitutionnelles, comme l’institution du Référendum d’Initiative Citoyenne, ou l’institution d’une nouvelle République…

Au-delà des expressions parfois violentes auxquelles nous avons assisté, notre devoir de chrétiens est d’entendre l’expression des souffrances et des inquiétudes de nos concitoyens, qui sont nos frères. Le désir de retrouver une cohésion sociale et une espérance en l’avenir est présent dans les manifestations de rejet d’un monde matérialiste et trop inégalitaire, qui ne fait plus la place aux rencontres (les ronds-points choisis pour cette expression en sont le signe paradoxal !) et aux relations humaines, laminées par une perpétuelle course à l’efficacité et à la performance.

Pour que le Débat national ait des chances de déboucher sur des solutions réalistes et durables, il semble devoir respecter une articulation en trois étapes :

  • Le premier enjeu du débat est de montrer de l’écoute sur les problèmes rencontrés et dénoncés. Faire l’inventaire des difficultés, ce qu’ont commencé à faire les « cahiers de doléances » et autres plates-formes de consultation comme celle du CESE. Et poursuivre le recueil et l’analyse des sujets évoqués. En particulier pour reconnaître ce qui s’adresse aux entreprises où nous pouvons agir.
  • Le deuxième temps est d’éclairer les débats par des faits et des éléments objectifs. Démêler le ressenti du réel et traiter les deux aspects, de façon à revenir sur des bases raisonnées en sortant de l’émotionnel, sans toutefois négliger la perception sensible au-delà des faits objectifs.
  • Le troisième sera de construire ensemble, et pas seulement « d’en-haut », des solutions viables. Travailler avec les personnes concernées ou un échantillon représentatif des différentes sensibilités pour surmonter les contradictions entre positions opposées ou entre le souhaitable et le possible est un exercice délicat, mais nécessaire, pour que les résultats soient appropriés et appréciés comme tels, donc durables.
  1. Que peuvent faire les EDC ?

Sur le fond, nous pourrions apporter une proposition de méthode consistant à ne pas séparer, même si on doit les distinguer pour travailler sur chacun, les quatre volets de l’écologie intégrale que nous propose le pape François dans Laudato Si’. En effet, si l’on coupe les sujets en rondelles, comme le fait un peu le questionnaire du Débat national, on perd de vue l’essentiel, qui est l’impact des propositions formulées sur la vie des hommes et des femmes.

  • Pour construire des discussions et des solutions complètes, il convient donc de travailler simultanément sur les quatre volets suivants pour chaque sujet abordé :
  1. économique, au sens de la création de richesses et de leur répartition juste,
  2. social, au sens des relations entre les hommes et de l’aspect collectif des décisions,
  3. environnemental, au sens de la préservation des ressources de la planète et de la vie,
  4. humain, en termes de gouvernance et de place de l’homme, au sens de la subsidiarité et de la participation de chacun à ce qui nous concerne tous.
  • Pour commencer ce travail qui s’étendra sur plusieurs mois, nous proposons de préparer quelques fiches synthétiques qui rappellent les enjeux et les conditions de traitement intégral des sujets déjà évoqués, du point de vue des EDC. Ceux qui veulent participer à cette rédaction peuvent se manifester auprès du secrétariat des EDC : lesedc@lesedc.org.
  • Le même travail se poursuivra sur les nouveaux sujets qui apparaîtront tout au long du processus et qui pourront nous être signalés à la même adresse, afin de permettre à nos membres d’y participer activement en apportant des pierres constructives au débat.
  • Nous pouvons également nous reporter aux livrets des EDC sur la RSE-Un regard d’entrepreneurs et dirigeants chrétiens sur la mise en œuvre du Développement durable, sur la Fiscalité et, pour la méthode, sur la Subsidiarité ou le Bien commun. Le livret sur la Participation en cours de publication complètera ces bases.
  • Enfin rappelons les fiches Points de Repères sur la Pauvreté, l’Ecologie intégrale et Accueillir les réfugiés, sur le site lesedc.org, ainsi qu’une fiche sur « Écouter, savoir se laisser bousculer » de novembre 2017  sur le site et l’espace membre.
 [1] Joseph Ratzinger : Démocratie pluraliste et orientation chrétienne, Paris, Fayard, 1987, p. 273, cité par François Huguenin dans Le pari chrétien, Tallandier, janvier 2018, p. 194.